Milena Agus le bonheur d’écrire

Publié le: Mar 30 2015 by Anita Coppet

thth-2Elle écrit comme quelqu’un qui vous ferait des confidences, vous raconterait des histoires qu’elle-même tient d’une lignée de conteuses. Ses personnages, éternellement en quête d’amour, portent en eux d’étranges fêlures. Observateurs d’un monde où leurs pensées secrètes sont plus fortes que les mots, ils pourraient exister… existent sûrement. Surtout, ils sont Sardes, car c’est en Sardaigne, son île, que Milena Agus trouve la matière de ses livres. Des récits de femmes, délicats, solaires et rudes comme la terre où elle vit.

Discrète, l’auteur n’est pas une habituée des interviews ou des plateaux télé. Un petit texte permet de mieux la connaître. Il fait suite à une micro nouvelle, Mon Voisin (ed.Liana Levi piccolo), mais aussi à Mal de pierre (en poche) le roman qui l’a fait connaître. Un éclairage sur son rapport aux mots et à son métier, que tout apprenti en écriture (ou non) appréciera.

« On m’interroge souvent sur mon « expérience de jeune écrivain ». Il me faut dissiper tout de suite un malentendu : je ne suis pas jeune et je ne suis pas écrivain. Mais j’ai besoin d’écrire et je n’arrive pas à regarder le monde différemment de quand j’étais réellement jeune. (…)

Quand j’écris, en revanche, je ne me complique pas l’existence je le fais pour le plaisir D’ailleurs, j’écris en secret avec le remords de voler du temps à la réalité. Si je sens un fourmillement au cerveau et que je dois écrire, et qu’on m’invite à sortir, je me garde bien de dire la vérité, j’avance toute une série d’excuses : pile de linge à repasser, copies à corriger et autres raisons du même tonneau.

J’ai toujours écrit. Jusqu’à une certaine époque, des histoires d’amour, la plupart à l’eau de rose. J’aimais ça à l’époque et j’en retirais beaucoup de bien-être et de joie. Maintenant ces textes me soulèvent le cœur, mais je les aime bien quand même, tout mielleux qu’ils soient, parce qu’à cette période, ils m’aidaient à me sentir bien dans ma tanière. (…)

Jusqu’à une époque récente, j’écrivais pour moi. Pour fuir, mais aussi pour retenir et sauver de la mort et de l’oubli des personnes et les émotions. Et j’écrivais pour ceux que j’aimais. Comme je n’arrive jamais à me faire vraiment comprendre quand je parle, je sentais qu’à travers des personnages, je pouvais mieux m’expliquer. J’offrais des histoires à mes proches et je leur disais ainsi des choses que je n’aurai jamais réussi à leur dire de vive voix.

Mais quand mes histoires ont changé, qu’elles sont devenues moins mielleuses, mais de plus en plus comiques et pitoyables, alors j’ai remarqué que les personnes qui m’aiment s’inquiétaient et y cherchaient des traces de ma vie réelle. Alors, je n’ai plus rien donné à lire à personne. Entre l’écriture et la publication, il s’écoule du temps et désormais, le danger que je me jette d’un balcon ou dans un puits, comme le font mes personnages, est passé.

 

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